Contrefaçon n°3 : Les guitares

Contrefaçon est une série d’articles sur le Japon concernant leur adaptation à la sauce nipponne de symboles qui sont traditionnellement rattachés à d’autres cultures .

Précédemment : La tour de Tokyo et les Superhéros.

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Article initialement publié le 23 Mars 2016

Avant de commencer je dois vous avouer quelque chose, cher lectrice ou lecteur. Poyjo n’a pas été très content de mon précédent article qu’il trouvait non abouti avec une partie « deux » bâclée.

Avait-il raison ? Peut-être, ma volonté première était de vous faire réfléchir sur les symboliques des super-héros si vous l’avez fait super sinon vous donnez raison à Poyjo.

Je vous pose donc la question suivante : Voulez-vous d’un monde où Poyjo aurait raison ?

A cette idée, si votre sang se glace, n’hésitez pas à vous pencher sur ma deuxième critique, ouvrir la boîte de Pandore (oui je me lâche) qui s’y cache et rendre le monde plus beau !

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Pour le troisième opus de cette série je vous invite à suivre l’histoire des contrefaçons japonaises d’un morceau de rêve américain : les guitares.

Comme toujours parlons du contexte. L’influence des États-Unis devenant de plus en plus forte, les japonais partagent leur culture et découvrent le rock qui apparaît dans les années 50 avec des icônes aussi fortes qu’ Elvis Presley ou Chuck Berry. Cela entraînera plusieurs répliques avec des artistes comme les Rolling Stones (versant anglais) ou Bob Dylan (pour la fusion pop). La liste n’est pas exhaustive bien entendu. Pour avoir une idée de l’impact que pouvait avoir le rock sur les jeunes de cette époque, je vous conseille de réécouter la célèbre chanson de Laurent Voulzy : Rockcollection.

Alors imaginons ce petit japonais qui écoute du rock dans le salon et qui rêve d’avoir une guitare Gibson ou Les Paul.

Le prix de ces guitares étant inaccessible pour un foyer japonais classique, des copies japonaises ont commencé a être commercialisées.

Bienvenue dans l’industrie de la lutherie japonaise (une partie du moins).

Vers l’infini et au-delà

Le mont Fuji est le sommet le plus haut du Japon mais c’est aussi le lieu de création de l’entreprise FujiGen Gakki (puis simplement FujiGen) qui pour l’anecdote a choisi ce nom simplement car il souhaitait être comme le mont Fuji la plus haute de leur catégorie, à savoir, la création de guitares mais surtout de violons.

L’entreprise commence sa production de violons en 1960 puis, deux ans plus tard l’élargit par la création de guitares électriques.

Nous sommes en 1962 et l’aventure commence réellement pour les japonais. C’est à ce moment que l’entreprise commence à produire des guitares pour des compagnies comme Ibanez, Greco ou Yamaha. J’imagine que vous connaissez Yamaha et même si les instruments que la marque fabriquait ne nous intéressent pas dans le cadre de cette chronique, son histoire a de quoi rendre curieux (130ans d’existence).

Ibanez ou Greco sont déjà des marques plus obscures pour vous, à moins que vous ne soyez amateur de guitares. Si c’est le cas vous commencez sans doute à comprendre où je veux en venir. Pour les autres et vous êtes nombreux selon cette étude de Poyjo sur mes lecteurs, nous allons faire des focus sur ces marques.

Made in Japan

Ibanez

Après son rachat en 1933 par Telesforo Julve Spain, le groupe Hoshino Gakki commence à fabriquer des guitares acoustiques pour les exporter en Espagne sous le nom d’Ibanez Salvador puis simplement Ibanez.

Dans les années 70 et c’est ce qui nous intéresse, la marque se lance dans la réplique de guitares américaines pour les Européens et les Américains principalement.

Leurs guitares se démarquent par leurs coûts abordables et leur très grande qualité. Le succès fut tel que la marque commercialisa ensuite des modèles de guitares électriques originaux sous leur nom réservant leurs imitations à une sous-marque « Cimar ».

Pour vous rendre compte de l’impact d’Ibanez ; des groupes aussi prestigieux que System of a Down ou Linkin Park utilisent leurs guitares.

Greco

Si Ibanez est essentiellement une marque d’export, Greco cible le territoire Japonais.

Les premiers pas de l’entreprise sont assez laborieux avec des copies grossières sans réellement d’intérêt si ce n’est le prix .

Par la suite la qualité ira crescendo avec des copies des derniers modèles de grandes marques beaucoup plus fidèles aux originaux. Le coup de génie de Greco fut de proposer au début des années 80 des copies de guitares électriques de légende sous l’intitulé « super real ».

Ces répliques d’une quasi perfection (y compris au niveau du son) poussera l’entreprise Fender dont les modèles étaient copiés par Greco à produire des Fender sur le territoire Japonais par la maison mère de Greco, le groupe Kandai Shokai arrêtant de ce fait la production des copies.

Et voici, pour accompagner la fin de l’article, un peu de musique par The Doors sur un titre appelé The End :

Ces deux marques n’étaient pas les seules à copier les géants américains. Citons des marques comme Aria, Toka ou Fernandes par exemple.

Face à cette problématique nous avons vu la réaction de la marque Fender mais un autre géant américain engagea une riposte.

A la fin des années 80, Gibson fort de partenariats depuis les années 70 décide avec des marques japonaises, de créer une gamme recréant ses guitares mythiques sur le sol nippon.

Ainsi la marque Orville (bon marché) et Orville by Gibson (haut de gamme) furent crées et produites par FujiGen (comme on se retrouve). Destinées aux japonais, elles proposaient des guitares allant de 80000 yens pour les Orville à 200000 pour les Orville by Gibson sachant qu’en 1978 selon une étude du gouvernement français un ouvrier japonais gagnait en moyenne 148900 yen par mois.

La production fut arrêtée en 1998 mais elles sont encore aujourd’hui très prisées des amateurs : vous pourrez vous en rendre compte si vous faites une petite recherche sur internet ; les prix sont assez élevés.

C’est ainsi que se termine notre tour d’horizon des contrefaçons japonaises. Celles-ci ont marqué leurs époques, permis à des jeunes gens modestes de vivre de leurs musiques, de créer des courants musicaux, de rencontrer des personnes, d’apprendre simplement la musique ou juste et c’est l’important de vivre des moments heureux. Des moments de labeur ou d’extase mais qui auront construit les adultes qu’ils sont aujourd’hui.

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Sources :

Comme toujours , merci à vous d’avoir lu cette chronique

Merci à la belette cendrée pour la correction et merci à Poyjo pour me fournir un espace de liberté.

Je vous dis à dans un mois. Des bisous.

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