Blind Spot, une malvoyante au carrefour de sa vie

Article publié initialement le 6 Aout 2015

Blind Spot est un light novel de Guillaume Lebigot (connu sous le pseudonyme de AxelTerizaki) et illustré par Saeko Doyle, sorti en mars, avril et mai 2014 sous la forme de 3 tomes. Connu comme l’un des premiers sinon le premier light novel écrit par un français, il est édité chez Univers partagés et est disponible aussi bien sur Amazon que sur Kobo, Kindle ou sur le Play Store.

AxelTerizaki est une personne emblématique de la sphère otaku française à l’origine de la Brigade SOS Francophone et fondateur de Meido-Rando. J’ai découvert le jeune homme grâce à twitter et quelques passages furtifs sur le site de la Brigade. Sa passion inconditionnelle pour les ponytails et certains animes de bon gout en faisait quelqu’un d’intéressant à suivre mais c’est vraiment quand j’ai entendu parler de Blind Spot que j’ai eu un déclic. Un français écrivant un light novel ? Fascinant.

J’ai découvert Saeko Doyle en même temps que l’œuvre de cette chronique. Elle tient un petit site ici : Saeko Doyle’s Illustrations. Elle est illustratrice jeunesse et BD et a déjà travaillé sur quelques doujins auparavant.

L’histoire suit donc Ayako Suzumiya, une malvoyante de naissance vivant à Tokyo dans son quotidien et plus particulièrement à cette période de l’adolescence ou l’on est tiraillé entre ce que l’on veut faire de sa vie et le constat que l’on fait de son vécu d’une dizaine d’années. Nous la suivons supportant les désavantages de son handicap tout en essayant de construire son propre avenir en compagnie de ses amies Shizuka et Karen.

Pour un light novel à la française on retrouve la majorité des codes de la version japonaise aussi bien dans la couverture, dans le format (bien que légèrement plus petit), le contenu, les illustrations tout le long du livre et le découpage en chapitres. A noter également que le prix est un petit peu en dessous qu’un light novel chez Yen Press ou Ofelbe mais on n’y compte pas autant de pages.

Les lights novels japonais apparaissent en premier lieu dans des magazines de prépublication en petits morceaux avant d’être compilés en tomes. Dans ces magazines ils font l’objet du jugement des lecteurs et de la ligne éditoriale qui décideront si oui ou non la prépublication de telle ou telle œuvre continuera. En résulte que les auteurs doivent à tout prix essayer de plaire à leur lectorat dans les premières pages en donnant autant que possible satisfaction à celui-ci. Blind Spot n’ayant pas à supporter ce genre de contrainte prend son temps et ne démarre pas en trombes. Son auteur amène son sujet librement et cela permet à l’auteur d’amener son sujet comme il l’entend.

J’ai même envie de lui reprocher d’en prendre trop. Pour arriver jusqu’à la moitié du livre il faudra franchir de nombreuses périodes creuses ou l’on suit l’héroïne dans sa vie quotidienne au lycée, avec ses amies, à la cantine, durant ses pauses ou pour rentrer chez elle. Si pour une personne lambda et stupide comme moi il est intéressant de lire et ressentir ce que peut avoir de particulier ou d’embêtant la vie d’une malvoyante, Guillaume Lebigot fait une description minutieuse aussi bien de ces moments-là que d’autres un peu plus négligeables.

De manière générale il est livré énormément de détails sur les pensées d’Ayako. Si elles sont souvent intéressantes et nécessaires il y a de temps en temps des moments ou l’on aimerait qu’elle se taise ou qu’elle pense un peu moins. En réalité j’aurais été davantage était intéressé par plus de pensées concernant ses gouts, ses délires que ses pensées descriptives de tout ce qu’il se passe. Il reste à dire que le style de l’auteur est parfois assez redondant. Aussi bien dans sa manière de décrire que dans son emploi abusif de la 1re personne notamment quand on peut compter une dizaine de fois le pronom “je” dans un seul paragraphe.

Cependant, une fois ces défauts outrepassés, la lecture du livre devient un plaisir. J’avais peur en commençant Blind Spot de trouver en l’héroïne le réceptacle de tous les problèmes que peut rencontrer un malvoyant à Tokyo ou encore une fille sans personnalité. Heureusement Ayako est une fille enjouée, avec ses inquiétudes, ses rêves et ses gouts. On découvre une fille comme une autre mais qui a juste plus de travail à fournir que les autres à cause de son handicap.

L’auteur nous fait découvrir la malvoyance avec brio, on se surprend à imaginer relativement bien à quel point ce quotidien peut être difficile à vivre et à quel point Ayako mérite des louanges. Construit sous la forme d’un récit initiatique, Blind Spot nous fait découvrir entre quelques moments d’humour, les transformations dans la vie de l’héroïne comme lorsqu’elle doit apprendre à utiliser une canne ou s’habituer à porter des lunettes de soleil…

Le personnage principal n’est cependant pas qu’une malvoyante c’est avant tout une lycéenne. Elle doit faire face à l’opinion des autres, suivre ses cours avec son ordinateur portable, participer aux activités sportives à sa manière, mais comme n’importe qui passe du temps avec ses amies Shizuka et Karen, sort en ville, achète des livres ou va faire du karaoké. J’en veux juste au résumé en quatrième page de couverture pour m’avoir fait croire à tort que l’on suivrait l’histoire d’une fille rêvant de devenir chanteuse et qui serait confronté directement au métier. Induit en erreur j’ai attendu longtemps qu’elle se rapproche de cette destination promise mais rien de cela. C’est un résumé qui serait davantage adapté à la globalité de l’œuvre qu’à ce premier tome.

Saeko Doyle, l’illustratrice, fournit un bon travail, les héroïnes sont charmantes pour ne pas dire mignonnes et les émotions sont très bien rendues. On regrettera seulement l’absence de décors et l’utilisation importante de trames bien que les personnages collent parfaitement avec les descriptions qu’en donnent Guillaume Lebigot. La seule aberration concerne le personnage de Miho aussi insupportable visuellement (qu’est-ce que je déteste sa coiffure) que dans l’histoire mais je pense que c’est voulu (et réussi).

Le 1er Tome de Blind Spot est un avant-gout ou l’on apprend à connaitre le monde d’Ayako, ses difficultés, son entourage et ses désirs. Si le style de l’auteur n’est pas tout le temps excellent il reste bon et on se surprendra plusieurs fois à rire, à se prendre d’affection pour les héroïnes ou à s’inquiéter pour elles. Je vous le conseille vivement et si vous trouvez les débuts un peu mou, accrochez-vous car la suite en vaut la peine.

Voilà j’espère que cette critique aura réussi à vous convaincre d’acheter ce light novel. Si cela ne vous a pas suffit je vous redirige vers celle de Torashiro qui aborde d’autres points et je vous dis à bientôt pour la prochaine Chronique.

Pour acheter le livre c’est ici : Univers-Partages

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